Le Togo compte 117 communes. Chacune de ces communes dispose des atouts de divers ordres pour contribuer à l’essor de l’agriculture. À cet effet, l’action des maires, premiers responsables desdites communes et de leurs collaborateurs apparaît nodale. Il leur faut en comprendre les enjeux d’une part et savoir comment se fonder sur les atouts qui sont à leur disposition pour influer positivement et bénéfiquement sur le secteur. Tour d’horizons des opportunités qui s’offrent à ces mairies et les défis qu’elles doivent relever.
La décentralisation est un processus d’aménagement de l’État unitaire qui consiste à transférer des compétences administratives de l’État vers des entités (ou des collectivités) locales distinctes de lui.
Elle est fondée sur le principe de la libre administration qui confère aux collectivités territoriales, l’autonomie administrative et financière.
Selon Bassarou (2004), l’objectif de la décentralisation est la participation des populations au développement local, c’est-à-dire à la mise en œuvre de tous les moyens pouvant créer les conditions nécessaires pour la mobilisation des ressources ou des capacités locales pour favoriser le développement à la base[1].
En tant que telle, cette réforme qui est entrée dans sa phase active dans notre pays en 2019, responsabilise de nouveaux acteurs plus proches des communautés dans la gestion des entités administratives. Ces acteurs sont l’émanation de la population elle-même, puisque choisis parmi ces fils et filles par elle-même pour conduire les affaires de la cité.
Les autorités locales sont en charge du bien-être des communautés.
Avant la décentralisation, l’administration représentée exclusivement par les services déconcentrés de l’Etat étaient l’interlocuteur unique des populations dans tous les domaines du développement. Les services déconcentrés mettent en œuvre les orientations et les instructions de l’Etat central dans leur territoire et dans leurs domaines de compétence respectifs (éducation, santé, agriculture, environnement, artisanat, commerce, justice, etc.). Ils rendent compte à l’entité hiérarchique supérieure. Les relations entre populations et les responsables des structures déconcentrées de l’Etat sont purement techniques.
Au cœur de la décentralisation
Les autorités élues ont à la fois une fonction politique, administrative et technique vis-à-vis des populations. Si elles peuvent conduire directement la politique et l’administration par délégation sous la supervision des préfets, elles doivent par contre dans une large proportion s’appuyer sur les services déconcentrés de l’Etat et bien d’autres acteurs de développement intervenant dans leurs communes pour apporter des réponses techniques aux problèmes de leurs communautés.
Les services déconcentrés intervenant dans le territoire communal sont désormais des bras opérationnels de l’administration communale. Leurs responsables agissent comme des conseillers techniques des maires dans leurs domaines de compétence.
Selon les spécificités de chaque localité, l’implantation et la fourniture des services publics aux populations sont variables. Le transfert des compétences du pouvoir central aux autorités locales se faisant progressivement, la marge de manœuvre des élus communaux dans les différents secteurs de développement s’aligne sur le rythme de ce transfert.
Dans tous les cas, pour l’ensemble des domaines, les maires ont soit le pouvoir de décision sous le contrôle direct des préfets, soit la possibilité de plaider auprès de l’Etat ou d’autres partenaires en faveur de leurs communautés.
L’agriculture étant très importante pour l’économie togolaise et pour le développement de la plupart des communes, elle mérite une attention particulière.
En quoi la décentralisation peut-elle influencer le développement agricole dans les communes et in fine dans tout le pays ?
Pour mesurer l’impact de la décentralisation dans un secteur dans une commune, il faut au préalable faire l’état des lieux (atouts, faiblesses, opportunités, menaces) et situer les rôles des principaux acteurs intervenant dans le secteur concerné, leurs interactions, leurs moyens, leurs résultats, etc.
Le secteur agricole est très vaste. Il regroupe les sous-secteurs production végétale, production animale et production halieutique avec des chaînes de valeurs spécifiques impliquant un grand nombre d’acteurs au sein des différentes filières agricoles.
Ainsi, dans le secteur, on peut distinguer deux types d’acteurs, les acteurs directs et les acteurs indirects.
Les acteurs directs que sont les acteurs de l’amont à savoir les fournisseurs des intrants et des équipements de production, les producteurs, les transformateurs (artisanaux et industriels), les commerçants (détaillants, grossistes, exportateurs) et les consommateurs. Ils produisent, achètent et vendent des produits agricoles, bruts ou transformés. Ils sont des agents économiques.
Les acteurs indirects sont l’Etat, les mairies, les partenaires au développement, les ONG, les bureaux d’Etudes, les structures de financement, les assureurs, etc. Parmi ces types d’acteurs, il y a des acteurs publics et des acteurs privés. Certains sont à la recherche du profit individuel alors que d’autres défendent l’intérêt général.
L’Etat et les mairies sont des entités publiques qui orientent, conseillent, appuient, régulent et contrôlent les actions dans le secteur agricole dans l’intérêt général de tous les acteurs et de la population. Le ministère en charge de l’agriculture est le bras opérationnel de l’Etat dans la conduite de la politique agricole du pays.
Au niveau des régions et des communes, l’Etat est représenté par des services déconcentrés du ministère de l’Agriculture, de l’Elevage et du Développement Rural (MAEDR) comme l’Institut de Conseil et d’Appui Technique (ICAT), l’Institut Togolais de Recherches Agronomique (ITRA), les centre de formation (INFA de Tové, centre de l’Est-Mono, ferme égypto-togolaise d’Abatchang, CIDAP, CFAR, etc) pour accompagner la recherche agricole, la formation et la vulgarisation des technologies agricoles.
Plusieurs agences, projets et programmes publics interviennent également au niveau des communes pour la promotion de l’agriculture (ANSAT, APRODAT, MIFA, CAGIA, PNIASAN, projet SAFARI, projet KARA, PASA, projet YOLIM, PARTAM, etc…).
Des partenaires techniques et financiers (FAO, FIDA, Banque mondiale, PNUD, BOAD, BAD, GIZ, AFD, CEDEAO, UEMOA,…) accompagnent également les efforts de l’Etat et des acteurs agricoles à travers différents projets et programmes comme ProDRA, ProCIV, EFTPA, SSAB, ProSécAl, PRIM, PRODEF, PPAAO, PADAT, PDRI Mô, etc.
Les organisations non gouvernementales (ONG) intervenant au niveau de différents maillons agricoles sont très présentes dans les communes (ETD, OADEL, etc….).
Les organisations professionnelles agricoles (CTOP, interprofessions, chambre d’agriculture, .) regroupent les acteurs que sont les producteurs, les transformateurs, les commerçants, qui vivent essentiellement des activités agricoles et assimilées. Ces acteurs peuvent travailler individuellement ou collectivement (coopératives, GIE, associations, interprofession,..). Ces organisations sont les moteurs de mobilisation des acteurs pour la défense de leurs intérêts. La plupart ont des ramifications au niveau des communes.
Des institutions financières privées notamment les banques et les systèmes financiers décentralisés (UTB, BTCI, DECAWOWO, NSIA BANQUE, ORABANK, ECOBANK, BOA, FUCEC, WAGES, etc.) interviennent dans le secteur directement ou en partenariat avec les institutions publiques ou privées.
D’autres acteurs privés notamment des prestataires de services interviennent dans le pays et desservent les communes en matière de fournitures de semences, d’engrais, de produits phytosanitaires, de produits vétérinaires, d’aliments de bétails, d’aliments de poissons, d’équipements et de matériels de production (tracteurs, motoculteurs, pulvérisateurs,…), de construction d’infrastructures (magasins, irrigation, aire de séchage,…), de transformation agroalimentaire, et de transports, d’établissement de liens d’affaires, d’assurance agricole, de commercialisation, de restauration, de distribution de produits agricoles et alimentaires, etc.
Malgré les efforts déployés par l’Etat et par l’ensemble de ces acteurs, le secteur agricole togolais reste confronté à plusieurs défis à relever pour valoriser les énormes potentialités agricoles du pays.
L’avènement de la décentralisation positionne un nouvel acteur dans l’échiquier agricole du Togo. Les mairies ont un rôle capital à jouer dans le développement agricole de leurs communes. A cet effet, elles se dotent chacune d’un plan de développement communal prenant en compte tous les secteurs y compris l’agriculture. Ce plan permet de valoriser les potentialités agricoles, économiques, sociales, environnementales et culturelles de leurs localités. L’importance de la promotion des filières comme stratégie efficace dans le développement agricole n’est plus à démontrer.
En effet, une filière agricole bien organisée contribue fortement au développement économique et social d’une région et d’un pays. Les cas des filières café au Brésil, cacao en Côte d’ivoire, coton au Mali, la vanille à Madagascar, thé au Kenya sont édifiants. Par conséquent, nous allons analyser les opportunités agricoles dont disposent les communes à travers l’identification des filières agricoles dont les conditions agroécologiques permettent de développer de manière efficace pour répondre aux besoins de sécurité alimentaire, de création d’emploi, de l’amélioration des revenus des populations, etc.
Le tableau ci-dessous donne une idée des filières porteuses agricoles des régions et des communes du Togo.
Tableau : Les filières porteuses des régions et des communes.
Régions | Communes | Filières porteuses | ||
Production végétale | Production
animale |
Production
halieutique |
||
Maritime | AVE 1 AVE 2
BAS-MONO 1 BAS-MONO 2 YOTO 1 YOTO 2 YOTO 3 VO 1 VO 2 VO 3 VO 4 LACS 1 LACS 2 LACS 3 LACS 4 ZIO 1 ZIO 2 ZIO 3 ZIO 4 AGOE-NYIVE 1 AGOE-NYIVE 2 AGOE-NYIVE 3 AGOE-NYIVE 4 AGOE-NYIVE 5 AGOE-NYIVE 6 GOLFE 1 GOLFE 2 GOLFE 3 GOLFE 4 GOLFE 5 GOLFE 6 GOLFE 7
|
Sorgho, haricot, maïs, piment, riz pastèque, tomate, pomme de terre, soja, mil, fonio, igname, ananas, manioc
|
Caprins, ovins, porcins, volailles | Aquaculture, pêche continentale et maritime |
Plateaux | ANIE 1 ANIE 2
EST-MONO 1 EST-MONO 2 EST-MONO 3 MOYEN-MONO 1 MOYEN-MONO 2 AGOU 1 AGOU 2 DANYI 1 DANYI 2 AKEBOU 1 AKEBOU 2 KPELE 1 KPELE 2 KLOTO 1 KLOTO 2 KLOTO 3 OGOU 1 OGOU 2 OGOU 3 OGOU 4 AMOU 1 AMOU 2 AMOU 3 WAWA 1 WAWA 2 WAWA 3 HAHO 1 HAHO 2 HAHO 3 HAHO 4
|
Sorgho, haricot, maïs, piment, riz, arachide, soja mil, fonio, igname, ananas, manioc, café, cacao, coton, palmier à huile, agrumes, avocat, bananes, melons
|
Bovins, caprins, ovins, porcins, volailles, aquaculture | Aquaculture
pêche continentale |
Centrale | TCHAOUDJO 1 TCHAOUDJO 2 TCHAOUDJO 3 TCHAOUDJO 4
SOTOUBOUA 1 SOTOUBOUA 2 SOTOUBOUA 3 MÔ 1 MÔ 2 TCHAMBA 1 TCHAMBA 2 TCHAMBA 3 BLITTA 1 BLITTA 2 BLITTA 3
|
Sorgho, haricot, maïs, piment, riz, arachide, soja, igname, manioc, anacarde, mangue, agrumes, coton | Bovins, caprins, ovins, porcins, volailles | Aquaculture,
pêche continentale |
Kara | KERAN 1 KERAN 2 KERAN 3
BASSAR 1 BASSAR 2 BASSAR 3 BASSAR 4 DANKPEN 1 DANKPEN 2 DANKPEN 3 KOZAH 1 KOZAH 2 KOZAH 3 KOZAH 4 BINAH 1 BINAH 2 DOUFELGOU 1 DOUFELGOU 2 ASSOLI 1 ASSOLI 2 ASSOLI 3 |
Sorgho, haricot, maïs, piment, riz, arachide, pastèque, tomate, pomme de terre, soja, mil, fonio, igname, manioc, anacarde, mangue, coton |
Bovins, caprins, ovins, porcins, volailles |
Aquaculture,
pêche continentale |
Savanes | CINKASSE 1 CINKASSE 2 TONE 1 TONE 2 TONE 3 TONE 4 KPENDJAL 1 KPENDJAL 2 KPENDJAL-OUEST 1 KPENDJAL-OUEST 2
OTI 1 OTI 2 OTI-SUD 1 OTI-SUD 2 TANDJOARE 1 TANDJOARE 2 |
Sorgho, haricot, maïs, piment, riz, arachide, pastèque, tomate, oignon, anacarde, coton
|
Bovins, caprins, ovins, porcins, volailles |
Aquaculture, pêche continentale |
Source : données Ministères, CNP-Togo.
Il ressort de ce tableau que l’agriculture occupe une place centrale dans la plupart des communes du Togo. Les filières agricoles sont nombreuses et offrent beaucoup d’opportunités pour les communes. Mais, toutes les filières ne sont pas logées à la même enseigne au niveau des communes d’une même région.
C’est pourquoi, par commune, il est important que ces filières fassent l’objet d’une classification plus rigoureuse pour dégager les plus porteuses de développement. Cela permettra une meilleure concentration des efforts sans toute compromettre l’objectif de diversification agricole nécessaire à l’amélioration de la sécurité alimentation et l’accroissement des revenus des acteurs agricoles et des populations.
Le concept de filière agricole porteuse peut désigner une filière dont les conditions agroécologiques pour son développement durable existent et qui est capable de dégager une valeur ajoutée suffisante au niveau de ses différentes chaînes de valeur, de favoriser la création d’emploi, la sécurité alimentaire et des bénéfices pour les individus, pour la commune et pour le pays. Il s’agit d’une filière qui a beaucoup d’avantages comparatifs par rapport aux autres filières et qui peut servir de levier au développement de la commune et du pays. Un investissement dans une filière offre des récompenses multiples pour les individus et pour la nation.
Au niveau national, les filières agricoles prioritaires sont le maïs, le riz, le coton, le café, le cacao, le soja et l’anacarde.
L’élaboration et la mise en œuvre du plan développement communal (PDC), boussole de la mairie, contribueront à affiner le choix des filières porteuses et à mieux circonscrire les actions à mener dans le secteur agricole communal pour atteindre des résultats probants.
Pour ce faire, les communes avec à leurs têtes les mairies pourraient contribuer à :
- Mobiliser les différents acteurs du secteur agricole de leurs communes pour une participation active à l’élaboration et à l’exécution du PDC,
- Faciliter les partenariats pour le renforcement des capacités techniques et financières des acteurs agricoles notamment des producteurs et transformateurs agricoles locaux,
- Développer les partenariats notamment la coopération décentralisée avec d’autres mairies aux niveaux national, africain, européen et asiatique disposant des expériences et des capacités utiles à faire bénéficier à la commune dans le secteur agricole,
- Anticiper les perturbations internes ainsi que les chocs exogènes qui pourraient perturber le développement agricole, la sécurité alimentaire, les revenus agricoles, la santé des populations et la préservation des ressources naturelles.
Le chantier étant très vaste, il est utile de mettre l’accent sur certains problèmes récurrents qui perturbent l’évolution normale des activités agricoles dans les communes togolaises pour lesquels l’avènement des mairies constitue un véritable espoir pour les acteurs agricoles en général et pour les producteurs en particulier.
Les problèmes fonciers ruraux. Sans une terre sécurisée, il y a peu de chance qu’il ait un investissement consistant et durable dans l’agriculture. La contribution du Maire pourrait consister à une application rigoureuse de la loi et des textes réglementaires régissant le foncier rural togolais, à attirer des investisseurs dans l’agriculture tout évitant de favoriser l’accaparement des terres à grande échelle (ATGE) dont sont actuellement victimes les petits producteurs agricoles de par le monde.
L’agriculture péri-urbaine perd du terrain au profit de l’urbanisation
Le maraîchage est un moyen d’existence d’un grand nombre de producteurs agricoles des communes urbaines. Mais, cette activité est menacée de disparition en ce sens que les habitations, les infrastructures hôtelières et touristiques se développent et font disparaître à grand pas les sites exploités pour le maraîchage dans les zones urbaines et périurbaines. L’établissement des schémas d’aménagement des territoires des communes pourrait apporter des réponses certaines et durables à la répartition judicieuse du territoire communal notamment autour des activités économiques de la commune.
Conflits entre agriculteurs et éleveurs
Tout comme le producteur agricole a comme moyen d’existence ses cultures, celui de l’éleveur (le peulh) sont ses animaux. Mais, la recherche de l’alimentation pour le bétail conduit parfois l’éleveur à causer des dégâts sur les cultures mais aussi sur les points d’eau servant de boisson ou d’irrigation pour l’agriculteur. Il s’en suit généralement des affrontements parfois mortels. Les régions Centrale et de Kara sont les plus exposées à ce problème. L’autorité communale pourrait s’appuyer sur les services de l’Etat pour un bon suivi du plan de gestion de la transhumance dans sa commune. Il faut faire respecter les périodes et les couloirs de pâturage. Le comité de gestion de ce type de conflit pourrait également être renforcé ou crée selon les communes.
Les difficultés d’accès aux intrants à bonne date
L’intrant est pour le producteur ce qu’est l’acier pour le carbone. L’intrant améliore de manière significative la productivité agricole (culture, animaux, poissons,…). Néanmoins, les producteurs sont confrontés presque toutes les campagnes aux problèmes d’accès et parfois de la qualité des intrants. Des efforts de subventions du gouvernement sont parfois sabotés par des intérêts privés. L’intervention du Maire pourrait aller dans le sens de plaider auprès de l’Etat pour la poursuite du mécanisme de subventions des intrants et auprès des opérateurs économiques pour la mise en place des intrants à proximité des zones de production à un prix raisonnable. Le programme Yolim pourrait servir de source d’inspiration.
Les difficultés d’accès au financement adapté aux activités agricoles
Le secteur agricole africain et togolais est aux prises en permanence avec de multiples aléas qui le rendent moins attractif au financement notamment celui des institutions financières privées. Très peu de crédit sont alloués aux acteurs agricoles principalement aux producteurs agricoles. Le Maire pourrait faciliter la mise en place des mécanismes de financement innovant entre producteurs, institutions de financement et opérateurs d’assurances. La promotion des clusters avec des liens d’affaires entre acteurs de la filière constitue une illustration concrète d’un mode de financement agricole à explorer.
La pénibilité des activités agricoles éloigne de plus en plus les jeunes ruraux de l’agriculture
L’emploi des jeunes est une préoccupation mondiale, nationale mais aussi communale. L’agriculture constitue pourtant un vivrier d’emploi très faiblement exploité dans la plupart des pays africains comme au Togo. La pénibilité des travaux agricoles est l’une des raisons de ce paradoxe.
La mécanisation et la numérisation agricoles pourraient rendre l’agriculture plus attractive et plus performante.
Le Maire pourrait plaider auprès de l’Etat, des partenaires au développement, des opérateurs économiques pour un investissement dans la modernisation agricole au niveau des communes. Les exemples de l’APRODAT dans la construction des retenues d’eau et des postes d’eau, du MIFA avec AFRICA LEASE au Togo dans la mécanisation, des Centres d’Utilisation des Matériels Agricoles (CUMA) au Bénin et de Hello Tracteur au Nigeria dans la mécanisation, du SIMAgri au Burkina Faso, de systèmes AgriPME et Agri-SWAP et CAPI au Togo dans les informations sur les marchés agricoles, pourraient être évalués, adaptés au besoin et ensuite même mis à échelle dans les communes.
Les produits agricoles et alimentaires du terroir sont très peu valorisés
Le Togo est aujourd’hui en tête des pays africains pour la production et l’exportation du soja biologique. Ce qui non seulement procure un avantage financier pour les acteurs mais aussi une bonne image du pays. Chaque région a au moins un avantage comparatif dans la production ou dans la transformation d’un produit agricole. A l’instar de l’igname provenant de Bassar, du café de Kpalimè, du miel des savanes, bien de produits du terroir méritent d’être développés. Il faut valoriser les produits locaux par la production en qualité et en qualité et par le marketing. Le Maire est le premier ambassadeur des produits de sa commune. Il pourrait aussi encourager l’organisation des foires agricoles communales et faciliter la participation aux foires nationales et internationales aux meilleurs produits de sa commune.
Des communes sont en insécurité alimentaire
Bien que toutes les communes soient productrices agricoles, il n’en demeure pas moins que certaines n’arrivent pas à couvrir leurs besoins alimentaires tout au long de l’année. Ainsi, une frange de leurs populations éprouve principalement pendant les périodes de soudure des difficultés d’accès à la nourriture. Pour cela, des mécanismes de gestion de ces périodes sont développés au niveau régional (CEDEAO, UEMOA) mais aussi au niveau national. L’Agence nationale de la sécurité alimentaire (ANSAT) en est le bras opérationnel de l’Etat au Togo. Elle a un dispositif de desserte de toutes les communes. Les communes doivent s’informer sur les systèmes d’alerte existant afin de plaider pour l’activation en temps réel du dispositif de soutien alimentaire aux populations vulnérables. Les autorités locales doivent également veiller à l’efficacité du système afin que les personnes ciblées en soient les vraies bénéficiaires.
Les ressources naturelles sont en dégradation avancée dans la plupart des communes
Les sols, l’eau, le couvert végétal subissent des agressions naturelles mais surtout anthropiques du fait de l’agriculture intensive, de l’agriculture sur brûlis, de l’élevage intensif, de la pollution, du non-respect des textes réglementant la pêche (INN) et surtout de l’utilisation des matériels et engins prohibés, etc. Les autorités communales pourraient apporter leur contribution aux différentes initiatives allant dans le sens de la conservation des ressources naturelles végétales, forestières, hydrologiques, édaphiques et halieutiques.
De toute évidence, pour la plupart des communes de notre pays sont à vocation agricole. Le secteur agricole constitue donc un centre d’intérêt pour la quasi-totalité des communes. Les potentialités sont nombreuses et offrent une multitude d’opportunités pour l’essor de la commune. Les autorités locales et principalement les mairies ont tout à gagner en s’engageant résolument dans la promotion agricole selon les spécificités de leurs communes. Aussi, les acteurs agricoles et principalement les producteurs agricoles fondent-ils un réel espoir sur la décentralisation pour trouver de meilleures solutions à leurs sempiternels problèmes.
Enfin, le secteur agricole apparaît comme un levier pour le développement des communes togolaises. Il importe alors que les autorités locales disposent d’un cadre formel de concertation périodique avec les différents acteurs (services déconcentrés, ONG, Organisations professionnelles, partenaires techniques, bureaux d’études, institutions financières,…) pour s’informer et pour prendre des décisions en faveur de l’essor de l’agriculture communale et du bien-être de leurs populations.
Gilles Lazare, agroéconomiste