Le Global center on Adaptation constate que le continent consacre bien peu d’investissements à l’adaptation aux changements climatiques, dont le coût est pourtant déjà supérieur aux efforts consentis. Le secteur privé peut davantage jouer son rôle.
Les flux de financement de l’adaptation en Afrique n’ont atteint que 11 milliards de dollars par an en 2019-2020. L’augmentation en 2021-2022 sera probablement modeste, même si elle dépasse les 10% l’an, mais elle n’approchera pas le doublement avant 2025 si les tendances actuelles se poursuivent. Ainsi prévient le Global Center on Adaptation (GCA) dans une étude publiée la semaine du 4 septembre 2023.
« Le financement de l’adaptation est fortement concentré autour de dix pays africains, qui reçoivent à eux seuls plus de la moitié des dotations. »
Étude qui révèle que le continent a besoin de 53 milliards $ par an pour s’adapter aux changements climatiques, adaptation, soit 2,5 % de son PIB. Un chiffre qui pourrait être largement sous-estimé, préviennent les auteurs de l’analyse : l’Afrique pourrait avoir besoin de plus de 100 milliards $ par an pour l’adaptation. Cela signifie que, d’ici à 2035, l’Afrique pourrait avoir besoin de 845 à 1 007 milliards $.
Au taux de croissance actuel du financement de l’adaptation, l’Afrique ne recevra qu’environ 180 milliards $ d’ici 2035, soit moins d’un dixième de ce dont le continent a besoin. Doubler le financement actuel (40 milliards $) ne suffira donc pas, en cette hypothèse.
De plus, GCA calcule que le manque à gagner économique lié à l’absence d’investissements en matière d’adaptation en Afrique pourrait atteindre 6 000 milliards $ d’ici à 2035.
On le voit, les avantages économiques des mesures d’adaptation en Afrique dépassent de loin les coûts financiers. Les analystes constatent, pour s’en inquiéter, que la majorité (54 %) des fonds d’adaptation destinés à l’Afrique sont acheminés sous forme de prêts, « ce qui aggrave la situation d’endettement des pays ».
Dans les secteurs de l’énergie et des transports, la part des subventions dans le financement de l’adaptation est inférieure à 15 %. Même pour l’agriculture, la part des subventions est d’environ la moitié (53 %). L’Afrique prend à sa charge la majorité des flux de financement de l’adaptation. D’après l’étude, les flux de financement de l’adaptation vers l’Afrique ne représentent encore que 39 % du total des flux de financement de la lutte contre le changement climatique.
Le potentiel du secteur privé
Voilà pourquoi « toutes les parties prenantes peuvent augmenter de manière substantielle le financement de l’adaptation et la composante « dons » de ce financement », jugent les auteurs. Qui estiment que les institutions financières multilatérales « peuvent encore » augmenter les flux d’adaptation vers l’Afrique. De leur côté, les institutions bilatérales peuvent mieux rendre compte du financement de l’adaptation et augmenter les 1,8 milliard $ qu’elles versent chaque année.
Pour autant, insiste l’étude, « c’est le secteur privé qui a le plus de potentiel pour augmenter le financement de l’adaptation ». Aujourd’hui, les entreprises du secteur privé investissent moins de 0,3 % du financement total de l’adaptation en Afrique. Dans le même temps, en Asie du Sud et de l’Est, le secteur privé investit près de 40 % de l’ensemble des flux financiers liés au climat, créant des emplois et soutenant une croissance économique intelligente face au climat.
Enfin, l’étude révèle un dernier « message » : le financement de l’adaptation est fortement concentré autour de dix pays africains, qui reçoivent à eux seuls plus de la moitié des dotations ; les pays doivent renforcer leur planification stratégique, leurs programmes prioritaires d’adaptation et leurs institutions. Car les dix pays africains les plus vulnérables au climat ne reçoivent que 18 % des fonds d’adaptation.
Seuls sept pays d’Afrique disposent aujourd’hui de tous les éléments stratégiques et de planification essentiels à la mise en œuvre de mesures d’adaptation : mandats institutionnels clairs, secteurs prioritaires identifiés, coûts d’adaptation estimés et objectifs d’adaptation spécifiques définis. Ces pays sont prêts à absorber des financements et à mettre en œuvre des programmes d’adaptation à grande échelle.
Dès lors, concluent les analystes du CGA, le renforcement de la planification stratégique, des programmes prioritaires d’adaptation et des institutions constitue « une tâche essentielle pour la plupart des pays africains ». Il permet de transformer des objectifs en projets réalisables.
Luc Amen