Le mercredi 28 mai 2025 est une date historique. La Bourse régionale des Valeurs mobilières a officiellement lancé la première Bourse des Matières Premières Agricoles de Côte d’Ivoire (BMPA-CI), en Afrique francophone. L’objectif est de transformer structurellement l’économie ivoirienne ; mettre en place un mécanisme transparent de fixation des prix des produits agricoles ; mieux rémunérer les producteurs et stimuler la production. Que faut-il en retenir ? Comment fonctionne-t-elle ? Et à quoi sert-elle aux producteurs agricoles ?
Qu’est-ce qu’une bourse des matières premières ?
Une bourse des matières premières est un marché où se vendent et s’achètent des produits agricoles, énergétiques ou miniers. Ce n’est pas une bourse « d’actions », comme celle de la BRVM pour les entreprises, mais un lieu où l’on fixe les prix des récoltes de manière transparente et réglementée.
À la BMPA, les agriculteurs peuvent vendre leur production directement à des commerçants, des industriels ou des exportateurs, en passant par une plateforme organisée.
Pourquoi créer cette bourse en Côte d’Ivoire ?
La Côte d’Ivoire est un géant agricole en Afrique : premier producteur mondial de cacao, de noix de cajou et de cola. Pourtant, la majorité des producteurs vivent dans la précarité, faute de prix stables et de circuits de vente fiables.
La BMPA veut changer cela, avec plusieurs objectifs :
Fixer des prix justes et connus à l’avance, pour mieux rémunérer les producteurs ;
Créer un marché régional autour des matières premières agricoles ;
Faciliter l’accès au financement, en permettant aux producteurs d’utiliser leurs récoltes comme garanties bancaires (grâce au système de récépissés d’entreposage) ;
Professionnaliser la chaîne agricole, en améliorant le stockage, la logistique et la qualité des produits.
Quels produits sont concernés au départ ?
Pour démarrer, la BMPA se concentre sur trois cultures importantes :
- La noix de cajou, dont la Côte d’Ivoire est le 1er producteur mondial ;
- La noix de cola, très utilisée en Afrique de l’Ouest ;
- Le maïs, culture de base pour l’alimentation.
Ces produits ont été choisis pour leur volume de production, leur potentiel commercial, et leur besoin d’un encadrement plus rigoureux.
Comment cela fonctionne concrètement ?
La BMPA repose sur un système de récépissés d’entreposage : le producteur dépose ses récoltes dans un entrepôt agréé par les autorités, où elles sont pesées et contrôlées. En échange, il reçoit un récépissé d’entreposage, un document qui atteste de la quantité et de la qualité de sa marchandise.
Ce récépissé peut être :
- Utilisé pour vendre sa production sur la bourse ;
- Présenté à une banque pour obtenir un crédit en attendant la vente ;
- Conservé pour attendre que le prix soit plus intéressant.
L’Autorité de Récépissés d’Entreposage (ARRE) est chargée de gérer et de certifier. Les entrepôts de l’ARRE sont localisés dans les chefs-lieux des principales zones de production et dans les zones portuaires notamment à Abidjan et à San Pedro.
Quels sont les avantages pour les agriculteurs ?
La BMPA veut transformer l’agriculture de subsistance en agriculture commerciale organisée. Elle offre aux producteurs :
- Un accès direct au marché, sans dépendre des acheteurs informels ;
- Des prix transparents et compétitifs, définis par l’offre et la demande ;
- Un meilleur accès au crédit, car les banques reconnaissent les récépissés comme garanties ;
- Un appui à la conservation et à la qualité des récoltes, grâce aux entrepôts certifiés.
Quels sont les défis à relever ?
Le succès de la BMPA dépend de plusieurs facteurs :
- Former les agriculteurs à utiliser le système ;
- Multiplier les entrepôts certifiés à l’intérieur du pays ;
- Sensibiliser les banques et les acheteurs à cette nouvelle approche ;
- Assurer une régulation efficace pour éviter les abus.
Un pas vers l’avenir agricole de l’Afrique de l’Ouest
Avec la BMPA, la Côte d’Ivoire ne cherche pas seulement à mieux vendre ses récoltes : elle veut bâtir une économie agricole moderne, capable de rivaliser sur les marchés internationaux. Ce modèle pourrait à terme s’étendre aux autres pays de l’UEMOA, comme le Sénégal, le Bénin ou le Mali. En organisant les échanges autour de produits agricoles stratégiques, la BRVM ouvre une nouvelle page du financement et de la compétitivité de l’agriculture africaine.
Source : Madis