Comment mobiliser conjointement la recherche et les acteurs du changement pour s’orienter vers des pratiques plus durables et réduire l’usage des pesticides de synthèse ? C’est l’objet de l’initiative Pretag (Pesticide Reduction for Tropical Agricultures), coordonnée par le Cirad, avec le soutien et la participation d’Agropolis Fondation et de la Fondation FARM.
L’usage mondial des pesticides de synthèse a quasiment doublé entre 1990 et 2018, passant de 1,7 à 2,7 millions de tonnes (FAO, 2020). Les pays tropicaux n’échappent pas à cette tendance avec une forte augmentation de cet usage durant les vingt dernières années. En outre, dans nombre de ces pays, l’accès à l’information sur les risques liés aux usages de pesticides demeure souvent insuffisant et les réglementations sont parfois défaillantes ou difficiles à appliquer.
Face à ce constat, des scientifiques issus de 14 unités de recherche de Montpellier – Cirad, IRD, Institut Agro Montpellier, INRAe et CNRS se mobilisent, aux côtés des parties prenantes de la production, de la transformation, de la commercialisation et avec les décideurs publics dans le cadre de l’initiative Pretag (Pesticide Reduction for Tropical Agricultures).
Elles veulent réunir les connaissances sur l’usage des pesticides de synthèse dans les agricultures tropicales et favoriser le développement de solutions alternatives.
« Cette initiative s’inscrit dans le contexte de la transition agroécologique, sujet sur lequel les unités de recherche montpelliéraines sont très impliquées, souligne François X. Côte, délégué aux filières tropicales au Cirad et coordinateur de l’initiative. Elle rassemble une communauté scientifique interdisciplinaire et vise à établir des liens directs entre cette communauté de scientifiques et les acteurs du changement pour développer rapidement des alternatives réellement applicables sur le terrain. »
L’initiative est coordonnée par le Cirad, avec le soutien et la participation d’Agropolis Fondation et de la Fondation FARM.
Au-delà d’un soutien financier, la Fondation FARM a souhaité s’impliquer dans le projet en contribuant à la mobilisation des acteurs du changement. « Nous sommes attachés dans le cadre de l’initiative à consulter des représentants des filières de l’amont à l’aval, des porteurs de solutions innovantes issues du secteur privé et des bailleurs de fonds, pour nourrir les plaidoyers qui résulteront de nos travaux », ajoute Catherine Migault, directrice de la fondation.
Cinq cas d’étude « filière » pour co-construire les changements
Pour Océane Trevennec, d’Agropolis Fondation, « compte tenu des enjeux de santé et de préservation de la biodiversité, il est essentiel d’accentuer les efforts de recherche pour déterminer les freins et les leviers techniques, sociaux, politiques et économiques d’une réduction à court terme de l’usage des pesticides de synthèse dans les pays tropicaux ».
Cinq études de cas, caractéristiques de filières locales et d’exportation, sélectionnées pour leur expérience de longue date en termes de réduction des pesticides, sont au programme de l’initiative :
- Le maraîchage périurbain en Afrique de l’Ouest
- La culture du cacao en Afrique de l’Ouest
- La riziculture en Asie du Sud-Est
- La culture du café en Amérique latine et en Asie
- La production de bananes dessert en Afrique et aux Antilles
Durant le projet, toutes les parties prenantes des filières seront impliquées dans la co-construction des changements à opérer pour réduire l’utilisation des pesticides. Fait rare, les analyses prendront en compte le coût économique engendré par ces changements de pratiques.
À travers chaque étude de cas, ce sont également des projets, consortiums ou initiatives déjà existants que Pretag entend soutenir par sa démarche : l’initiative ECOFFEE R&D pour le café et le projet Marigo pour le maraîchage, l’Initiative française Cacao durable (IFCD) et l’initiative équivalente pour la banane (IFBD), le consortium national d’agriculture de conservation et intensification durable (Casic) pour le riz.
L’initiative proposera, en outre, une approche transversale et générique des différentes filières pour identifier des leviers à l’échelle des territoires ainsi qu’à travers des normes et réglementations au niveau des politiques publiques.
Enfin, elle permettra d’agréger un ensemble de données quantifiées sur l’utilisation des pesticides, y compris les herbicides, globalement et par culture.
Au-delà de la phase initiale de deux ans, l’initiative vise la construction avec les parties prenantes des pays du Sud d’une alliance internationale pour la réduction de l’usage des pesticides dans les agricultures tropicales. Cette alliance aurait pour ambition l’échange d’expériences, de connaissances et la mise en œuvre de formations sur la réduction des pesticides.