L’entreprise MINAGRO GROUP est spécialisée dans la transformation des matières premières notamment le manioc, l’igname, la patate douce et les céréales en farines panifiables de haute qualité utilisées dans la boulangerie et la pâtisserie. La crise mondiale de la farine de blé se présente comme une opportunité d’affaire pour cette unité de transformation présente depuis près d’une décennie sur le sol togolais.
Dans une interview accordée au journal AgriTorch, la Directrice de MINAGRO GROUP, Mme Ouro-Agoro Amina Azia revient sur les activités de sa société, les difficultés à satisfaire la demande, et la nécessité pour les boulangers et pâtissiers d’incorporer les farines locales dans leurs productions, au regard de la situation actuelle sur le marché international quant aux difficultés d’approvisionnement en farine de blé.
Journal AgriTorch : Dites-nous quel est l’engouement suscité par la crise mondiale du blé dans vos activités ?
Mme Ouro-Agoro Amina Azia : MINAGRO GROUP est opérationnelle depuis déjà 09 ans dans la production des farines locales. Nous avons réfléchi très tôt en innovant et en mettant sur le marché ces farines locales qui doivent servir dans les boulangeries et pâtisseries. Et voilà qu’aujourd’hui il y a cette crise de la farine de blé.
Pour nous en tant qu’entrepreneur, c’est plutôt un moment d’opportunité d’affaires puisque les boulangers se retournent vers nous demandant la farine locale, à se former pour pouvoir faire l’incorporation de la farine de blé à la farine locale. J’invite les boulangers et boulangères à faire usage des farines locales dans la fabrication des pains et autres produits surtout que nos farines locales sont naturelles, très riches vitamines et sans gluten.
C’est dire que cette crise du blé a fait augmenter les activités de MINAGRO
Oui. Disons qu’on n’arrive pas à satisfaire la demande. Au démarrage nous faisons juste une transformation d’une tonne. Après, nous sommes à 5 tonnes de transformation de manioc par jour et nous n’arrivons pas à satisfaire cette demande. Nous pensons aller à grande échelle avec la transformation de 50 tonnes de matière première notamment le manioc par jour pour pouvoir avoir au moins 200 tonnes de farines par mois pour satisfaire la demande.
Quels peuvent être les produits à base de la farine de manioc ?
La farine de manioc peut servir à fabriquer des pains, de gâteaux, des croissants, et même des pâtes alimentaires avec du blé et des œufs. Cette farine rentre aussi dans le processus de fabrication du yaourt. Donc la farine de manioc c’est de l’or blanc que nous ne mettons pas suffisamment en avant. Nous invitons les jeunes à s’investir à la production de cette matière première qui tend à disparaître.
En termes d’approvisionnement de matières premières et de production, quelles sont les difficultés auxquelles vous êtes souvent confrontées ?
Par rapport à la matière première, nous avons des variétés spécifiques que nous avons déjà analysées au niveau de l’Institut Togolais de Recherches Agronomiques (ITRA). Ce sont ces variétés que nous voulons développer. Avec les producteurs, la production est vraiment familiale. Ce ne sont pas de grandes capacités de production, entre 2et 5 hectares par coopérative.
Nous sommes dans la vision où nous devons atteindre 3000 hectares de manioc pour pouvoir faire les 200 tonnes de farines chaque mois sur les 12 mois de l’année. Ce qui veut dire que c’est toute une chaîne de valeur que nous sommes en train de déclencher, de la matière première jusqu’à la transformation et la distribution. Il faudra vraiment qu’on assure la production de la matière première avant de pouvoir continuer, sinon nous aurons tous les équipements qu’il faut mais nous ne pourront pas produire.
Vous devez alors augmenter également vos capacités de production
Bien-sûr. Nous sommes à 5 tonnes actuellement. Nous comptons aller à 50 tonnes parce que nous avons déjà des contrats sur le plan national et international et nous devons satisfaire cette demande de plus 200 tonnes de farine par mois alors que nous sommes à 5 tonnes de farine actuellement. Nous sommes dans un processus où il faut chercher des investissements pour installer des équipements afin de répondre à cette demande.
Il faudra également réorganiser les coopératives de production pour qu’ils puissent nous donner la matière première qu’il faut et surtout arriver à ce que ces producteurs puissent trouver un rendement de 25 à 30 tonnes à l’hectare puisqu’actuellement, les producteurs n’ont que 10 tonnes à l’hectare parce que les boutures qu’ils utilisent ne répondent pas vraiment. Dans l’intervention de l’Institut de Conseil et d’Appui Technique (ICAT) et de l’ITRA est nécessaire pour que nous puissions atteindre les objectifs.
Quel message avez-vous à l’endroit du gouvernement ?
Nous remercions déjà le gouvernement pour son soutien et Mme le Premier ministre qui a fait l’effort de venir voir ce que nous faisons à MINAGRO GROUP. Nous demandons encore plus l’appui du gouvernement en tant que garantie au niveau des banques ou au niveau de potentiels investisseurs. Juste une garantie pour que ces investisseurs puissent nous accompagner à installer des équipements modernes pour pouvoir satisfaire les demandes, ce qui permettra aussi de créer plus d’emploi.
Nous avons aussi besoin de l’accompagnement des autorités, des mairies et des préfectures que ce soit un appui technique et des subventions si possible. La CEET peut par exemple nous réduire les coûts de l’électricité par exemple pour tous ceux qui sont dans la transformation des farines locales, puisque l’énergie représente une grosse charge pour nous également. La production d’énergie à base d’épluchure de manioc est par exemple des techniques qu’il faudra développer. Seuls, nous ne pouvons pas y arriver. Nous avons besoin d’un accompagnement afin de minimiser les charges pour que les produits soient aussi accessibles sur le marché.
Propos recueillis par David SOKLOU