Dans la grande famille des engrais, le phosphate et la potasse ne font que baisser depuis un an. « Rien de violent, mais une baisse 5, 10 ou 15 dollars chaque semaine », explique un négociant. Lentement, mais sûrement, les différents intrants ont globalement perdu les deux tiers de leur valeur.
La potasse qui était à 1 000 dollars la tonne en vaut 350 – coût et fret pour une livraison en Inde –, et bientôt peut-être 300, car les Canadiens viennent d’acter une vente à 307 dollars, ce qui devrait pousser les autres vendeurs à s’aligner.
Le DAP qui valait plus de 1 200 dollars la tonne en vaut aujourd’hui 485. Les prix sont si bas qu’en Chine des usines qui ne sont plus rentables ont dû suspendre leur activité.
L’urée aussi a baissé, mais de manière moins linéaire : cet engrais dont les plantes ne peuvent pas se passer est sensible au moindre soubresaut, que ce soit un appel d’offres en Inde ou une crainte de rupture d’approvisionnement chez un gros fournisseur.
Une demande en chute dans l’espoir de prix encore plus bas
Cette tendance de prix peut s’expliquer par la surestimation des sanctions contre la Russie. On l’a vu depuis plusieurs mois, elles n’ont finalement pas freiné le commerce des engrais. EuroChem et PhosAgro, les deux géants russes de ce secteur, produisent à plein régime et continuent d’exporter.
Cette spirale négative des prix est aussi alimentée par la chute de la demande. Les importateurs misent sur des prix qui vont continuer à baisser et achètent le minimum nécessaire, ou parfois rien du tout.
S’ils ont peut-être raison de le faire, pour le DAP et la potasse, l’urée, dont le prix est lié à celui du gaz, pourrait avoir atteint son point bas et amorcer un début de remontée, selon Mounir Halim fondateur d’Afriqom (Agence d’information sur les prix spécialisés sur le marché des engrais en Afrique)
Une opportunité pour les pays africains
Le continent africain qui a durement souffert depuis un an et demi de la flambée du prix des engrais, pourrait en théorie tirer bénéfice du contexte actuel, à condition que les pays soient réactifs. Car à part quelques exceptions, rares sont ceux qui anticipent et achètent en dehors des périodes habituelles de commandes, même si le marché leur est favorable. Faute d’être bien informés, de nombreux pays ne réagissent par ailleurs souvent pas assez vite quand les prix remontent, contrairement aux Brésiliens ou aux Américains qui sont à l’affût et passent commande au moment opportun.
Selon un de nos interlocuteurs, certains importateurs privés africains hésitent également à acheter de peur d’être mis en concurrence avec un bateau d’engrais offert par une institution ou un pays comme cela s’est vu ces derniers mois. Un cadeau qui fait s’effondrer momentanément les prix sur le marché local.
source: RFI