Tous les pays aspirent à la satisfaction de la demande alimentaire de leurs populations à partir de la production domestique. Au Togo, la filière avicole peine à répondre à cet impératif.
En effet, selon le Président de l’Association Nationale des Professions Avicoles du Togo (ANPAT), Monsieur MOUSSOU Winssou Kudjo, la production locale actuelle de la volaille ne suffit pas pour répondre aux besoins de la population. Il y a un gap important à combler. Ainsi, le Togo comme la plupart des pays de l’Afrique de l’ouest, reste ouvert aux importations massives de la volaille.
Malheureusement, cette situation qui vise à couvrir la demande domestique à la fois à partir de la production locale et des importations, risque de maintenir le pays dans une dépendance prolongée.
La volaille produite localement affronte sur le marché local celle importée et ceci, dans une concurrence à tout le moins déloyale. Les produits importés de qualité douteuse proviennent des pays dont la production et les exportations sont fortement subventionnées. Ce qui encourage les investissements et augmente la capacité de production de ces concurrents, réduisant encore les prix de revient de leurs produits ainsi que les prix de vente sur le marché international et dans le marché africain.
Les gouvernants se retrouvent du coup dans un dilemme de vouloir satisfaire les besoins des populations en protéines animales à moindre coût et engranger des ressources fiscales sur les importations d’une part, et encourager la production locale d’autre part.
Ainsi, en dépit des opportunités que représente le marché de la volaille pour les aviculteurs locaux, les acteurs de la profession avicole locale se trouvent ainsi lésés et parfois déboussolés par ce facteur exogène et d’autres multiples aléas qui perturbent leurs activités.
Mais, loin de garder le statu quo, le gouvernement togolais soucieux de la santé des populations, de la couverture à plein temps des besoins alimentaires, de la création de l’emploi pour les jeunes et de la richesse nationale, ne cesse d’affirmer sa volonté politique à promouvoir l’élevage en général et l’aviculture en particulier.
La création récente d’un ministère dédié à l’élevage, la mise en place de plusieurs projets et programmes publics d’appui à la filière sont quelques actes qui dénotent de cet engagement public.
De leur côté, les acteurs directs de la filière n’ont pas non plus croisé les bras. Point de fatalité ! Ils se sont constitués progressivement en organisations dont l’ANPAT assure la coordination. Cette association, fortement dominée par les aviculteurs, les transformateurs et les commerçants locaux, est membre de la CTOP. Elle œuvre pour une meilleure organisation des acteurs, et défend leurs intérêts auprès des instances nationales et internationales.
La décision salutaire du gouvernement qui exige la prise en compte de 10 % des produits locaux dans le volume total des importations de la volaille au Togo témoigne des effets positifs du plaidoyer de cette association.
En dépit de ces initiatives encourageantes, la filière fait face encore à d’énormes défis qui entravent son plein essor. Il s’agit principalement entre autres de :
-La faible organisation des acteurs notamment ceux des maillons transformation et commercialisation locales ;
-Les maladies aviaires sporadiques et presque endémiques dont la grippe aviaire qui cause des dégâts aux aviculteurs sans dédommagement ;
-Le dumping subit par les producteurs locaux de la part de leurs homologues des pays européens et brésiliens fortement subventionnés ;
-Le faible développement de certaines activités importantes comme la production de poussins, la provenderie, etc.
-L’accès limité aux services vétérinaires par les aviculteurs individuels ;
-L’absence de mécanismes de financement et d’assurance appropriés à la production avicole ;
-Le faible développement de la normalisation et de la certification des produits locaux pour encourager la consommation de la volaille locale notamment par les chaines de restauration et hotellière internationales ;
– L’aversion des acteurs à fournir des données statistiques sur le niveau de leurs activités etc…
Au regard de ces défis, le renforcement de l’organisation interne des acteurs notamment de l’ANPAT, la poursuite de la mise en œuvre de la méthode des quotas, l’instauration d’un dialogue périodique et permanent entre les acteurs publics et privés, l’accroissement de la capacité de production locale, sont autant d’actions à court terme nécessaires à la construction d’une filière avicole plus robuste et plus durable au Togo.
Gilles Amoussou, expert en Politiques agricoles